Les inclassables / Gordon Korman

Une classe dite d’inclassables qui a pourtant de la classe !

Quand on entre dans cette salle de cours, on se croirait dans la cour des miracles. C’est bien la sensation de Kiala, une adolescente américaine, qui vient d’intégrer ce nouveau collège. Suite à une erreur lors de son inscription, Kiala a été affectée dans cette classe, celle dite des « inclassables », des « irrécupérables », bref, celle où personne ne veut aller… La jeune héroïne se prend au jeu et décide de rester et d’observer.

Elle va donc faire connaissance avec des élèves plus étranges les uns que les autres : Elaine la haine dotée d’une force démesurée et qui défonce tout sur son passage, Parker atteint d’une dyslexie incroyable mais aussi Barnstorm, ancien sportif de haut niveau, victime d’un accident et qui n’a plus les honneurs, Aldo le caractériel…Mais le plus corsé, c’est encore Monsieur Kermit dit Kermit la grenouille, le prof affligé de cette classe. Il n’attend qu’une chose, la retraite et passe son temps à lire le journal, à faire ses mots croisés tout en buvant son café, dans un énorme mug, surnommé la « bassine ». Il donne des exercices mais sans jamais les corriger. La situation va s’inverser avec l’arrivée de Kiala. Attachée à ses camarades d’infortune, elle s’intéresse à leurs problèmes et va essayer de remotiver tout le monde, y compris l’enseignant. Tout un programme !

C’est un roman polyphonique, plusieurs points de vue alternent : celui de Kiana qui fait le lien entre les différents protagonistes, celui de l’élève dyslexique qui fait de la conduite accompagnée mais aussi celui de l’enseignant… L’ensemble est délibérément et délicieusement caricatural et hyperbolique. Voilà un sujet rarement traité en littérature jeunesse. Ce roman montre que l’intelligence est multiple : manuelle, intellectuelle…On peut s’en sortir avec de la volonté, tout adolescent même s’il est différent, a de la valeur. Beaucoup d’humour et d’autodérision : on ne compte plus les passages cocasses (virée en voiture des élèves, métamorphose du véhicule du prof, rapports entre élèves, pédagogie positive et infantilisante de la collègue de Kermit). Cette immersion d’une élève dite « normale » est bien vue et sonne juste. Mine de rien, sous une apparence comique et déjantée, on dénonce le mépris dont sont trop souvent victimes ces élèves injustement stigmatisés et on tend à les réhabiliter.

C’est un exemple de résilience, aussi bien pour les élèves que pour le prof. Les élèves sont émouvants dans leurs difficultés de tous ordres mais aussi leurs atouts, leurs points forts (passion pour la mécanique).

Un roman au style très américain qui offre, du coup, une distance bienvenue. Un roman insolite, optimiste et finalement nécessaire, qui fait du bien.

2020

À retrouver (entre autres) dans les Biblis de Rennes

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