Cagliari, en Vie mode d’emploi, façon Perec.
Passions imaginaires, amours ancillaires, rêveries sentimentales ou réalité sexuelle, on en est tourneboulé, comme « sens dessus dessous », dans ce récit plein de jolies extravagances.
A Caligliari, Alice, une romancière solitaire et candide au physique insignifiant, qui tombe amoureuse du fils de M. Johnson, vit à l’étage intermédiaire entre deux voisins qui ne manquent pas de sel. M. Johnson, violoniste virtuose septuagénaire, fringué comme l’as de pique, occupe un appartement irrésistible qui donne sur le port de la Marina. De loin, il porte beau, mais, de plus près, il paraît vaguement négligé, ses poches sont déchirées et il ne sent pas la rose. Ces détails font flancher la charmante Anna, divorcée, incorrigible romantique, qui habite un entresol quasi insalubre, privé de lumière, avec sa fille Natasha un peu farouche ; cette dernière se ronge les sangs à propos des déboires amoureux de sa mère et des infidélités imaginaires de son fiancé. Un jour cuisinière, un autre chanteuse, Anna sert à Johnson désormais de femme de ménage, couturière, dame de compagnie, et plus si affinités pour les beaux yeux du musicien. Depuis que la parvenue Mme Johnson a quitté le domicile, il s’est clochardisé, sentimentalement aussi. Anna ne tarde pas à repérer des revues porno cachées dans son étui à violon. Elle joue le jeu, se met à porter des dessous chics, rêve d’une nouvelle vie avec le grand artiste du dernier étage.
Mais n’est-ce pas Alice – de père suicidé et éloignée d’une mère devenue cinglée – qui tire les ficelles de cette comédie humaine dont les habitants de l’immeuble qui refusent de vivre comme les autres, seraient de simples marionnettes ? Alice s’invente son intime pays des merveilles. La spécialité de l’immeuble, ce sont les amours rêvées, compliquées, avortées, empêchées, décalées. Heureusement que la narratrice Alice est là pour corriger de sa plume pleine de grâce communicative ce que le réel pourrait avoir de trop convenu ou de trop déprimant.
2016
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